Comme tous les trimestres, la communauté Autres-Mondes d'over-blog organise un concours de nouvelles. Cette fois-ci le thème retenu était "royaume en ruine", parmi une dizaine d'autres. Finalement je me suis permis un texte à contrainte assez original, qui traiterait de ce thème, mais aussi des autres qui avaient été proposés mais non retenu (une dizaine au total). Et comme j'étais en forme, j'ai aussi pris le thème du trimestre précédent, à savoir "terre des dragons". Et pour que ce soit bien visible, parce que je ne suis pas un garçon compliqué, j'en ai fait le titre de ce texte court.
Bonne lecture.
Spooky.
Il s’envola. De là-haut, il pouvait contempler le chaos, le royaume jadis orgueilleux qui l’avait défié, et qui n’était que désolation. Aussi loin que portait son regard froid, il ne voyait que ruines, cadavres, fumée et puanteur. Pourtant la cité avait été construite dans un recoin isolé de la montagne, afin qu’il ne la retrouve pas lorsqu’il se réveillerait. Mais c’était sans compter sans la malédiction séculaire qui pesait sur les Sans-Cœur, et selon laquelle un dieu de cuivre et d’airain descendrait du ciel en chute libre pour les anéantir.
Ils voulaient à tout prix préserver leur trésor, des champignons miraculeux qui lui revenaient de droit. Son souffle de feu avait permis de les mettre à jour, enfouis dans une cave sous la plus grande de leurs constructions éphémères. C’est là que se trouvaient les rejetons des hommes-champignons, les derniers de leur espèce. Ah, qu’ils avaient été ridicules lorsqu’ils l’avaient aperçu dans le ciel, comme leur panique avait été réconfortante, comme leurs cris avait été source de jouissance lorsqu’il avait réduit en cendres leurs piètres défenses, qu’il avait, juste pour le plaisir, attrapé quelques-uns d’entre eux entre ses crocs d’airain pour en faire des miettes. Il ne les avait pas mangés, oh non, la bile qui leur servait de fluide vital aurait gâté ses neuf estomacs ; non, c’est le plaisir pur qui avait guidé ses actes, leur fin brutale avait été un plaisir infini. Dans sa moisson virtuelle de vies inutiles, il n’avait pas oublié son plaisir ultime : laisser en vie le monarque fantoche de cette cité grotesque, celui-là même dont les ancêtres avaient jadis violé son sanctuaire, détruisant irrémédiablement sa propre couvée sans défense, attirant sur eux l’anathème qui se vérifiait aujourd’hui. Ainsi il pourrait contempler les conséquences que l’acte irréfléchi de ses aïeuls avait provoquées.
Ah, que cette journée était belle, que la vue était belle de là-haut… d’un coup d’ailes membraneuses, le dragon repartit dans un rire de soufre.