Un an. J'ai mis un an à voir ce spin-off de la célèbre saga intergalactique. Ne nous attachons pas aux raisons de ce retard, mais aux implications. Lorsqu'il est sorti, les avis sur les réseaux sociaux (je ne me fie plus trop aux critiques professionnelles, même dans des media spécialisés) étaient, comme TOUJOURS avec à peu près n'importe quel film susceptible d'attirer un tant soit peu de monde. Les gens n'ont pas aimé ceci, d'autres ont aimé exactement les mêmes choses. Certains n'aiment pas la tête de tel acteur parce qu'il a vieilli (là, franchement, ça me gonfle), et le rapport à la musique, quand il y en a, est très diversifié. Les VRAIS fans (ce qui est de toute façon une appropriation totalement subjective) ont adoré, mais d'autres VRAIS fans sont prêts à mettre sur le bûcher tel scénariste, producteur ou réalisateur qui a osé toucher à une oeuvre canonique... Bref, ce genre de cirque me collant un ulcère assez vite, je me contente de lire les avis de quelques personnes que je trouve intéressantes et posées, en évitant les plus gros spoilers. De toute façon, si je vois le film au bout d'un an, vu que j'ai une mémoire de poisson rouge (ou juste parce que j'ai autre chose à penser), j'en aurai oublié les trois quarts. Si certain(e)s d'entre vous se reconnaissent là-dedans et sont un poil pas contents, eh bien sachez que je m'en fous.
Cet épisode, que l'on pourrait numéroter III,9 car il s'intercale entre le III (La Revanche des Sith) et le IV (rebaptisé plusiques années après sa sortie initiale en Un nouvel espoir) raconte donc, pour faire court, comment les plans de l'Etoile de la Mort ont été récupérés par l'Alliance rebelle. Mais rembobinons 15 ans auparavant. Galen Erso, ingénieur de premier plan, est enrôlé contre son gré par l'Empire pour réaliser une nouvelle arme absolue, capable de détruire des planètes entières. Sa fille Jyn, qui a pu échapper à l'enlèvement contrairement à sa mère (tuée lors de l'enlèvement de l'ingénieur), est récupérée par les rebelles afin de retrouver un proche de son père, qui pourrait savoir où celui-ci est retenu prisonnier. Ceci afin, en dernier lieu, de trouver le moyen de détruire cette arme absolue, une histoire qui sera contée plus tard. Voilà, c'est aussi simple que ça, enfin presque, parce que pour arriver à ce résultat, Jyn, aidée d'un tueur, d'un pilote, d'un droïde, d'une sorte de jedi et d'un flingueur, va devoir aller au coeur de l'Empire, et va risquer sa vie pour un simple renseignement...
Bon, si on regarde de plus près, il y a des incohérences dans le scénario, dans l'architecture des différents lieux qui se distinguent par des défauts de conception. Alors certes, dans des civilisations où les droîdes et robots son légion, cela peut faire sourire de devoir sortir un enregistrement de la taille d'une VHS d'une banque de données de façon manuelle. Mais on peut par exemple se dire que ces équipements ont été conçus par des ingénieurs prisonniers de l'Empire, qui ont essayé de faire chier leurs oppresseurs, avec leurs moyens. Ou ne pas se prendre la tête avec ce genre de choses, et se laisser embarquer.
Comme je l'ai fait. Suivre Felicity Jones, interprète de la Jyn Erso adulte, certes assez jolie, mais pas canon non plus, entourée de gens presque ordinaires, si l'on excepte un simili-Jedi aveugle et un androïde. On y croise aussi des ingénieurs qui résistent à leur manière, un chef de guerre dépressif (je vais y revenir), ou encore certains personnages iconiques de la série (je vais revenir dessus également). Je me suis laissé porter par le rythme, la bataille endiablée sur la planète Scarif, rythmée par la musique de Michael Giacchino (qui prend donc la relève de John Williams), tout sauf envahissante.
Sur le plan des personnages, il y a beaucoup à dire. Parlons des nouveaux venus dans l'univers Star Wars. Les personnages centraux n'ont aucun pouvoir particulier, ce ne sont ni des Jedis, ni des Siths, simplement des créatures aux convictions bien ancrées. J'ai eu de l'empathie pour ces personnages, pris dans des enjeux intergalactiques, et prêts à tout pour que leurs idéaux de liberté triomphent. Nous avons même, au milieu du film, une discussion fort intéressante entre Jyn et Cassio, son escorte, sur leurs motivations respectives. Ils ne sont pas outrés, ont des comportements normaux, du moins compréhensibles dans la situation qui est la leur, et leur destin n'est pas dicté par le gnangnan et la bienséance. A la fin du film, on se dit qu'on aimerait bien les revoir. Mais sans vouloir spoiler si toutefois vous ne l'avez pas encore vu, ce Rogue One est un one-shot, et nombre de personnages n'apparaîtront pas dans la suite. Les acteurs qui les incarnent sont convaincants, tous sauf un. Enfin disons que le traitement d'un personnage est... déconcertant. Jyn retrouve, après 5 ou 10 ans, le fameux Saw Gerrera, une sorte de rebelle non-aligné, dont on s'attend à ce qu'il se joigne à la quête de la jeune femme. Mais...
[SPOILERS]
Dès qu'il la voit, il se transforme en plat de nouilles. Il pleure, se lamente, alors que le courage de Jyn aurait dû, aurait pu le galvaniser, du moins le faire douter. Non, pas un instant il ne fait preuve de volonté, d'énergie, et finalement disparaît dans un énorme gâchis. Gâchis aussi pour l'acteur qui l'incarne, Forest Whitaker, acteur oscarisé pour le Dernier roi d'Ecosse, totalement sous-exploité ici... Cela m'a presque fait sortir du film, alors que je trouvais qu'il était plutôt bien porté par les acteurs jusque-là. A noter que ce personnage est un milier de la série animée Clone Wars.
Le film propose également de retrouver plusieurs personnages iconiques de la trilogie d'origine, tels que Darth Vader, pour une apparition presque anecdotique (avec l'acteur gallois Spencer Wilding sous la longue cape et James Earl Jones toujours au doublage voix), la princesse Leia Organa, pour faire le lien avec l'Episode IV, ou encore le Grand Moff Tarkin, alors que son interprète, Peter Cushing, est décédé depuis 1994. Les techniciens ont pour cela utilisé une doublure numérique, un acteur qui a joué les scènes, mais dont le visage (et la silhouette, probablement) ont été remplacés par ceux de Cushing. Le résultat est bluffant, et quelque peu perturbant. A l'avenir, qu'est-ce qui empêcherait de faire jouer n'importe quel acteur décédé dans n'importe quel film auquel il ne pourrait prendre part ? D'autres personnages secondaires sont également présents, plus pour le clin d'oeil que par réelle nécessité.
Le méchant du film, le responsable de la construction de l'Etoile de la Mort, est incarné par l'Australien Ben Mendelsohn, dont la ressemblance avec l'Harrison Ford de la trilogie originale m'a troublé...
[FIN SPOILERS]
Le choix de Gareth Edwards pour réaliser les trois films spin-off de la saga n'a pas soulevé que des cris de joie. Il faut dire que son Godzilla a été l'un des films les plus conspués de ces dernières années. Pourtant il se révèle à la hauteur de la tâche, avec une mise en scène plutôt sobre, des acteurs plutôt bien dirigés et un montage sans effets particuliers. Rogue One a été écrit par Tony Gilroy (saga Jason Bourne, ce qui est cohérent avec le côté espionnage/action du film) et... Chris Weitz, scénariste et cinéaste s'étant notamment illustré sur la saga American Pie ou La Famille Foldingue. Il a également réalisé Pour un garçon avec Hugh Grant, À la croisée des mondes: La boussole d'or et Twilight Chapitre 2 - Tentation. Et curieusement, le film est assez équilibré, réservant seulement quelques instants d'humour, en général distillé par le droïde K-2SO. Pas de magie, très peu de Force, on se rapproche du film de guerre à la Il faut sauver le soldat Ryan pour l'ambiance. Certains ont mêlme soulevé des similitudes avec l'excellente série télévisée l'Enfer du devoir, centrée sur la guerre du Vietnam.
Bref, vous l'aurez compris, j'ai passé un bon, un très bon moment. Certains observateurs, impressionnés par la réussite artistique du film, l'ont placé au pinacle de la série, avec l'Empire contre-attaque, l'Episode V, réalisé par Irvin Kershner en 1980...
Spooky