J'admire Alan Lee, et surtout son travail, depuis des années, on peut même dire des décennies, depuis que j'ai vu ses illustrations sur les éditions du Hobbit et du Seigneur des Anneaux au début des années 1990 et son Calendrier Tolkien de 1993. Lorsque j'ai appris que son compère John Howe (qui est pour moi le deuxième des trois meilleurs illustrateurs de Tolkien)* et lui allaient travailler sur les adaptations cinématographiques des deux romans en tant que concepteurs des designs, j'étais sûr que visuellement ce serait de la grande qualité.
Voici cinq ans que l'aventure cinéma du Hobbit est terminée, et Lee nous propose de nous y replonger en nous livrant son cahier de croquis. Traduit par Vincent Ferré, responsable des traductions de Tolkien chez Christian Bourgois, il nous emmène de Cul-de-Sac à Erebor, en passant par l'atmosphère glacée et les géants querelleurs des Montagnes de Brume, les monstruosités arachnéennes de Grand'Peur ou encore l'architecture de la cité de Bourg-du-Lac.
Quel que soit le lieu, le crayon inventif et vigoureux d'Alan Lee fait merveille. Celui que Sir Ian Mc Kellen (l'interprète de Gandalf dans les six films) qualifie de "maître dans l'art ancien de l'aquarelle et de l'esquisse" livre -une fois encore !- une véritable boîte de chocolats fins, qui se déguste au coin du feu, avec un verre de nectar viticole du Comté et un pipe bourrée d'herbe idoine.
La fin du monde ne survint pas en l’an de grâce 1420. Pourtant, bien des signes l’avaient présagée. Les sombres prophéties des chiliastes ne s’accomplirent pas. Ils avaient annoncé la fin des temps avec précision : en février de l’an 1420, le lundi suivant la Sainte-Scolastique. Mais voilà… le lundi passa, vint le mardi puis le mercredi… et rien. Le Temps du Châtiment et de la Vengeance précédant la venue du royaume de Dieu n’advint pas. Mais, pour sûr, on ne s’ennuyait point ! C’est ce que pensait Reinmar von Bielau, surnommé Reynevan, un savant herboriste lié aux puissants de l’époque, espion et magicien à ses heures. Ce jeune homme, épris de la belle et fougueuse Adèle, l’épouse d’un seigneur silésien vivait des moments de passion inoubliables. Jusqu’au jour où les amants furent surpris par les frères du mari trompé. Ce fut le début des ennuis pour Reynevan…
Andrzej Sapkowski s'est mondialement fait connaître pour sa saga du Sorceleur, qui racontait les aventures d'un chasseur de monstres confrontés à la fin de son monde. Cette Trilogie hussite, postérieure à son oeuvre majeure, propose un cadre assez différent. Les aventures de Reynevan prennent pied dans un cadre historique très connu en Pologne, le pays de son auteur, aux prémices d'un conflit que l'on appela les guerres hussites, opposant pendant près de 15 ans l'Eglise catholique locale aux partisans de Jan Hus, théologien tchèque favorable à une réforme de l'Eglise.
Les tribulations de Reynevan, bientôt rejoint par Charley, un garde du corps aux connexions surprenantes, et par Samson Miel, un colosse aux origines nébuleuses, l'amèneront à se retrouver mêlé à ce conflit naissant, mais aussi à côtoyer des personnalités dont l'action pourraient bien changer la face du monde...
Cette Trilogie hussite, dont pour l'heure seule le premier volet est arrivé jusqu'à nous, est l'occasion pour Andrzej Sapkowski de montrer l'étendue de son érudition en termes d'ambiance médiévale. Nous avons ainsi droit à de longues descriptions des ambiances des villes, des villages de l'époque, mais aussi de la tenue de différents protagonistes, jusqu'au bout parfois de leurs chaussettes, pour peu qu'elles aient existé. Il y a de nombreux petits passages en latin, afin de montrer qu'il s'agissait alors plus ou moins de la langue commune de nombreux peuples européens, au sein des personnes relativement éduquées cependant. Des descriptions presque ad nauseam, qui risquent de faire décrocher la lectrice ou le lecteur, dans l'attente d'une avancée significative du récit. A côté de cela la magie fait irruption de manière presque brutale et sporadique, et Sapkowski s'y montre très à l'aise également, au cours de passages assez puissants. A ce titre le personnage de Huon von Sagan en est presque le plus intéressant du lot, et celui du grimpereau, plein d'énigmes.
Au final ce premier tome de la Trilogie hussite se révèle un roman dense, très dense, qui nous présente une période très troublée de l'Histoire européenne, avec beaucoup de noms, d'évènements à assimiler. Et un trio de héros qui semble ne pas trop savoir ce qu'il fait là... Un peu comme le lecteur...