Pour rendre un petit hommage à une personne que lui et moi aimons bien, l'ami pierig avait depuis quelques temps réalisé un chouette dessin le représentant en plantigrade. M'ayant demandé de rédiger un texte pour l'accompagner, je mis du temps à l'écrire, la récente crise d'inspiration ne m'ayant pas aidé. Puis un jour c'est sorti, et plutôt que de rédiger une sorte de note zoologique hasardeuse, et comme je ne suis pas sûr de mon humour, mon récit a très vite dévié vers le suspense, voire l'horreur, même si le récit se termine e façon opportune. Comme une nouvelle fois nous avons collaboré, c'est donc le texte, dont je suis moyennement satisfait au final, ainsi que l'illustration que je vous livre. Vous trouverez la même chose sur le blog de pierig. Une fois de plus, bonne lecture.
Spooky.
Observons le Didier dans son habitat naturel…
Pour ce faire, rendons-nous dans les hautes Fagnes, cette région sauvage où peu de personnes saines d’esprit osent s’aventurer…
Après la Baraque à Michel, une auberge fagnarde qui marque la limite de la civilisation, enfonçons-nous dans les bois touffus. Attention où vous mettez les pieds, des bornes-frontières et des tourbières sont encore des pièges pour les promeneurs inattentifs. Bientôt vous entendez un chuintement ténu, qui bientôt se transforme en murmure persistant. C’est le Baheyon, une rivière à l’aspect tranquille mais qui abrite des habitants redoutables. Encore une petite heure de marche, et votre pas se fait plus furtif, car vous approchez du territoire de chasse d’une créature unique.
Vous vous arrêtez, car vous avez entendu des bruits étranges. Vous tendez l’oreille. Oui, c’est bien un mélange de murmures étouffés, de bruits de mastication et d’éructations ursines. Pas de doute, un spécimen du Didius mac arthurus, surnommé Didier, est proche. Doucement vous vous approchez au sein des fougères qui bouchent la vue, en prenant garde à ne pas briser de brindille sous vos pas. Bientôt une clairière s’ouvre à vous, et il vous faut un examen approfondi de l’endroit pour repérer l’animal sauvage, tant son pelage se fond avec le décor. Mais il est bien là, vous l’avez trouvé.
D’une taille comparable à celle d’un grand homme, c'est-à-dire haut de six bons pieds, le plantigrade, qui vous tourne le dos, porte une abondante fourrure brune, parsemée de taches plus sombres, l’ensemble pouvant rappeler vaguement une chemise à carreaux de trappeur du Grand Nord. Les traces de différents combats ou repas subsistent encore ça et là sur la robe massive. Le Didier ne se lave pas souvent. Les éructations, les mouvements irréguliers de la tête ainsi que la position des pattes puissantes de l’individu suggèrent que l’animal est en train, justement, de déguster son dernier repas. L’instant est rare, vous ne souhaitez pas le gâcher.
Soudain la créature semble marquer une pause dans son festin. Elle se tourne légèrement pour humer l’air. Vous apercevez son groin difforme et l’un de ses petits yeux malins. Son appendice nasal se retrousse à plusieurs reprises. Vous vous rendez soudain compte que le vent, très léger, souffle dans votre dos. Erreur monumentale de la part d’un chasseur ou d’un scientifique…
Le Didier, visiblement un mâle en pleine possession de ses moyens, se tourna alors vers vous. Ses babine se retroussèrent hideusement pour découvrir des crocs d’une quinzaine de centimètres de long. Une langue sombre vint marquer l’intérêt du prédateur pour votre personne. Depuis plusieurs minutes, votre raison vous hurle de fuir à toutes jambes. Mais vous ne pouvez pas. Ce moment est tout simplement le sommet de votre carrière. Votre rencontre avec une créature légendaire… Qui va probablement faire de vous son dessert, puisqu’elle se met à quatre pattes, puis galope dans votre direction.
Vous n’avez aucune chance.
Vous êtes mort.
Mais heureux.