Il y a quelques temps je vous parlais du film éponyme réalisé par Christopher Nolan, sans tarir d'éloges à son sujet. Ca m'a donné envie de lire le roman dont il était adapté, écrit par Christopher Priest.
Première constatation : comme très souvent (pour ne pas dire toujours), le film est clairement une adaptation, au sens le plus simple du terme, c'est à dire une transformation. Cela se vérifie donc encore une fois, puisqu'il y a une couche narrative supplémentaire par rapport au film, à savoir la rencontre, de nos jours, de deux descendants des protagonistes principaux du film. Mais l'essentiel est là : la rivalité presque à la mort de deux prestidigi... prestigitati... deux illusionnistes des années 1870 à 1900 dans l'Angleterre victorienne. Leur relation des faits grâce à leurs journaux intimes respectifs, leur vie, leurs progrès dans l'art de l'illusion, et c'est tout. L'intrigue ne mérite pas un plus long résumé, sauf que... Sauf qu'elle s'avère riche, très riche, beaucoup plus que ce qu'il y a dans le film.
Il vous suffit de savoir que la rivalité entre Borden et Angier va bien au-delà de la mort, de la vie telle qu'on la conçoit classiquement, que le thème du double (et même du double je -non non, il ne manque pas une lettre à ce dernier mot) y tient une large place. Ce roman nous permet de nous immerger un peu dans la société victorienne, déjà largement exposée dans de nombreuses oeuvres -c'est d'ailleurs un réservoir incroyable pour les conteurs un peu en mal d'idées de départ. Je suis content d'y retrouver le personnage de Nikola Tesla, dont je vous ai déjà parlé, de retrouver certains passages importants -mais il y en a bien plus dans ce roman de 500 pages. Et, ô surprise, l'origine de l'inimitié des deux prestigita... magiciens est nettement plus dramatique que dans le film. Et puis, le Prestige du titre n'est plus du tout le même... De là à traiter Christopher et Jonathan Nolan de tâcherons, il y a un pas que je ne franchirai certainement pas, la version cinématographique ayant réussi à garder sa propre cohérence.
C'est donc un roman assez touffu, à tiroirs mais aussi un peu long. Je l'avoue, certains passages du journal d'Angier, où il décrit ses tournées, m'ont un peu lassé. Bien sûr, la plupart des passages contiennent une évolution plus ou moins importante de l'intrigue, et cela aide à approfondir la personnalité du personnage, chose qui n'est pas toujours soignée dans la littérature de genre. Mais quel genre ? Difficile de déterminer. Je l'ai lu dans la collection Folio SF, l'utilisation de machines électriques ayant un rôle prépondérant dans l'histoire, l'appartenance de Christopher Priest au genre SF (il a écrit, rappelons-le, Le Monde inverti et La Fontaine pétrifiante, considérés comme des classiques du genre), me font dire qu'il s'agit là d'un récit steampunk, puisque nous sommes à l'ère victorienne et qu'aucun autre élément que ces machines ne fait entrer l'histoire dans un genre. Pour le reste, il s'agit de deux journaux intimes encapsulés par un récit à la première personne.
Un roman étonnant, mais dont les longueurs ne plairont pas forcément à tout le monde...
Spooky.