[Réédition d'un article du 30 mars 2006]
Voici donc le dernier ouvrage de Stephen King, qui porte sur un phénomène de société très actuel, le téléphone portable. Précisons, comme le fait l’éditeur en toute fin d’ouvrage, que l’auteur ne possède pas de téléphone portable. Il est donc fort probable, comme tous les réfractaires le pensent, que c’est un fléau. Ce terme est à prendre à la lettre, puisque c’est (presque) le rôle tenu par le portable dans ce roman.
Boston, une belle journée de fin d’été. Clayton Riddell, auteur de comics, sort de chez un éditeur, avec lequel il vient de signer un juteux premier contrat. Il s’arrête pour prendre une glace, quand soudain le monde devient littéralement fou autour de lui. Une adolescente, qui vient de décrocher son portable, se jette soudain sur sa copine, l’égorgeant à pleines dents. Dans la rue, d’autres personnes semblent prises de démence, se sautent dessus, s’étripent… Avec un regard mort, et une attitude de zombie. Clayton, avec quelques autres, réussit à échapper momentanément à cette folie meurtrière. Rapidement, il s'aperçoit que la cause de tout ça est le réseau de téléphonie portable. Tout portable décroché semble délivrer un signal qui transforme toute personne normale en « siphonné » totalement hors de contrôle. Une sorte de virus informatique, qui efface les cerveaux comme des disques durs d’ordinateur, ne laissant qu’une couche originelle de données, celle de l’homme totalement sauvage. Mais comme dans un ordinateur, les données ne sont pas totalement irrécupérables, et les cerveaux se reprogramment lentement, pour devenir… autre chose.
Je vous vois venir. King nous refait le coup de Dreamcatcher, où l’histoire tient sur deux idées, le reste n’étant qu’une bouse monumentale. Cellulaire n’est certes pas le meilleur bouquin de King, mais quand même pas le pire non plus. Malgré ses grosses ficelles, ses choix de vocabulaire douteux (deux hommes appellent une adolescente « ma chérie », « ma puce », alors qu’il n’y a pourtant aucune ambiguïté sexuelle entre eux), King retrouve quand même un peu de sa fibre de raconteur d’histoires, qui a fait des merveilles dans des bouquins comme La Ligne verte ou Misery. Mais juste un peu. Parce que ses personnages sont un peu sans âme, et que la fin est plutôt mauvaise. C’est dommage, car le sujet valait le coup d’être bien traité par le maître du suspense. Rien que le titre originel, Cell, proposait déjà de belles pistes : Cell signifie à la fois « cellulaire » (= téléphone portable), mais également « cellule » (de prison). Cette dichotomie méritait mieux que cette resucée du Fléau (errance de survivants, visions fondamentales dans les rêves, chef charismatique des « méchants », mâtinée de films de zombies à la Romero. Romero qui est d’ailleurs un grand ami de King (ils ont travaillé ensemble sur plusieurs films).
Comme pas mal d’auteurs en mal d’inspiration, King fait donc dans le référentiel, voire l’auto-référentiel. Son histoire, si elle commence à Boston, se termine dans le Maine, au lac Kashwakamak, une région déjà explorée dans un de ses romans. Mais même la description de la région manque d’épaisseur. Vieillissant, Stephen King ? Probablement. Il faudrait peut-être qu'il prenne sa retraite...
Spooky.