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...:::Ansible:::...

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Tous les territoires de l'imaginaire, en vitesse supra-luminique. Chroniques sur le cinéma, la littérature, les jeux, séries TV, bandes dessinées.

Publié le par Ansible
Publié dans : #Livres
Michael Marshall Smith est un écrivain anglais, qui vit au nord de Londres, et qui a marqué l'histoire de la SF avec son roman Avance rapide, sorti en 1994 (1998 et 2002 en France). C'est aussi un nouvelliste assez prolixe, et les Editions Bragelonne nous font découvrir cette facette de son oeuvre. Marshall est un adepte du mélange des genres, et ce recueil l'illustre bien. De l'aventure au polar en passant par de nombreux sujets relevant du fantastique, de l'horreur ou de la SF, voici une trentaine de nouvelles de longueur variable (10 à 40 pages). Je n'ai aps aimé les premières nouvelles. Bavardes, inutilement alourdies par des descriptions du quotidien sans intérêt, j'ai failli abandonner ma lecture au bout des 4 ou 5 premières. Et puis sont arrivés des récits avec un peu plus d'épaisseur, une plus grande efficacité, une originalité dans le ton ou le sujet. "Quand Dieu vivait à Kentish Town", "L'Homme qui dessinait des chats", probablement la meilleure du recueil, "Voir la mer"... Des lectures qui, sans être incontournables, furent plutôt agréables. D'autres récits ont éveillé mon intérêt : voici des avis un peu plus longs sur deux des nouvelles, qui relèvent du genre vampirique, que j'ai réalisés pour le site Vampirisme.com.

"Rendez-vous demain" est un récit empreint d'étrangeté. Le héros, qui n'a pas de nom, est un développeur logiciel qui est en congrès à la Nouvelle-Orléans. Lors d'une soirée libre, il rencontre dans un bar Rita-May, jeune femme avenante qui commence à lui parler de vampires. 36 margaritas et 2 joints plus tard, notre ami se retrouve dans sa chambre d'hôtel, le lendemain, les idées troubles et ses affaires dans un drôle d'état... mais seul. Mais sa mémoire lui fait défaut : qu'a-t'il fait en fin de soirée ? Et qu'est devenue Rita-May ? Il décide de la retrouver, puisqu'elle lui a révélé où elle travaillait. Mais en pleine rue, il se retrouve propulsé... la veille au soir, immédiatement au moment où sa mémoire semble avoir baissé le rideau. Il continue à boire, leur flirt devient plus poussé... Et le sentiment d'étrangeté s'accroît, surtout quand il se retrouve de nouveau dans la rue, le lendemain, embrassant un réverbère et semblant biberonner une bouteille invisible... Et ainsi de suite. Si vous avez vu le film Memento, ce processus vous y fera un peu penser, sauf qu'en l'occurrence, au lieu de remonter le temps, les deux spirales "simultanées" semblent converger vers un instant T où les Saigneurs de la nuit jouent un rôle déterminant.

Je vous ai peut-être gâché le plaisir en vous révélant ce choix narratif original, mais je n'aurais pas pu vous parler de cette nouvelle (d'une vingtaine de pages) sans l'évoquer. J'espère donc que vous me pardonnerez. Pour tout vous dire, ce mouvement temporel m'a choqué dès sa première apparition, mais je ne comprenais pas ce qu'il se passait. Page tant, le gars est en train de picoler et de peloter sa nouvelle copine, et le page suivante, sans avertissement, le décor a complètement changé, et le héros lui-même met quelques secondes à réaliser - et non pas comprendre - ce qui lui arrive. J'ai d'abord cru à une erreur d'impression, prêt à appeler Bragelonne (la maison d'édition) pour leur signaler, avant de continuer ma lecture, et saisir enfin cette subtilité sans laquelle le récit n'aurait pas vraiment d'intérêt.

Comme je l'ai dit, la présence vampirique est ténue, presque éthérée (éthylée ?), puisqu'on n'en aperçoit qu'un, dont la nature se révèle lors d'un baiser typique. Séducteur, discret, efficace. Une ligne dans une nouvelle de vingt pages. Mais grâce au talent de Michael Marshall (qui parfois accole "Smith" en deuxième nom de famille) et à son choix narratif audacieux, c'est suffisant pour marquer le lecteur avide de sang frais...

Issue du même recueil que "Rendez-vous demain", "Chère Alison" montre une autre palette du talent de Michael Marshall. La nouvelle précédemment citée innovait dans son mode de narration, celle-ci se présente sous la forme d'une lettre d'adieu d'un mari à sa femme. Un homme qui a décidé de tout quitter, femme, enfants, boulot, car il ne supporte plus ce qu'il est devenu, un vampire. Un état qui n'est pas nouveau pourtant, puisque c'est à la faveur d'une relation extra-conjugale sans lendemain qu'il se fait mordre par une séduisante jeune femme. La nouvelle a donc la forme d'une lettre d'aveux et d'adieu à sa femme. Il lui raconte toute l'histoire, mais aussi le fait qu'il n'est pas sûr de pouvoir s'empêcher encore de leur sauter dessus pour les mordre à son tour. Dix ans après sa "faute". Outre le côté un peu risible de ces dix ans (quand même, s'il a pu se contrôler pendant aussi longtemps, il devrait pouvoir continuer, non ?), cette nouvelle reprend l'un des principaux aspects de l'écriture de Marshall : sa propension à une écriture domestique, présente dans la quasi totalité des autres nouvelles du même recueil. Oui oui oui, quand un auteur vous explique que son personnage se réveille, fume une clope, prend une douche puis son petit déjeuner, puis vous indique ce qu'il fait pendant toute une journée... puis recommence le lendemain, sans que cela ne se justifie une seule seconde par un effet de mise en scène ultérieur, j'appelle ça de l'écriture domestique. Cela ne sert à rien. Comme dans l'autre nouvelle, les vampires sont très peu présents, mais sont responsables d'un basculement irrémédiable. Notre personnage principal parle extrêmement peu de ce que ce changement induit sur sa personnalité, sur sa santé, sur la façon dont il étanche sa soif de sang frais...


Au final ? Près de 450 pages de lectures diverses, avec des histoires intéressantes, d'autres intrigantes, avec des points communs (le quartier de Kentish Town, au nord de Londres, où vit l'écrivain, des histoires dont le ressort est souvent une relation amoureuse, et une propension certaine à raconter un quotidien inutile). On y trouve même un hommage appuyé à l'oeuvre de Lovecraft, dans l'une des meilleures nouvelles du recueil. Un recueil à réserver aux amateurs de l'écrivain, sans plus, le mécanisme de la nouvelle n'étant pas vraiment bien utilisé.

Spooky.
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M
Très intéressant ton commentaire et surtout très agréable à lire ; je ne perdrai donc pas mon temps avec ce bouquin, rha la la l'écriture domestique juste de l'avoir dit... j'ai envie de fuir. Je vais plutôt me faire une bonne petite bd... avec de jolis dessins
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@
OOOhh oui qu'il y a du bon chez Brage!!!! Telle que Les mensonges de Locke Lamora et pleins d'autre encore... Parcontre je n'avais jamais vu "L'Homme qui dessinait des chats" mais honnetement vu ta critique, je pense pas me le procuré.Bonne soirée@llkey<br />
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P
Spooky>> Ok, merci pour ces précisions :)
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S
pierig > pis Une fille comme les autres, qui est peut-être un chef-d'oeuvre ! : http://ansible.over-blog.net/article-24644014.html
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S
pierig > en fait mes lectures actuelles sont le fruit d'une soirée organisée par lesdites éditions Bragelonne, à l'issue de laquelle j'ai pu me procurer une dizaine de bouquins. Un peu au hasard, un peu suivant les conseils d'Ange (oui, l'auteur de BD) ; c'est vrai que mes lectures ne sont pas tout à fait satisfaisantes, mais je n'ai pas encore tout lu. Par contre bragelonne est quand même l'éditeur leader sur le créneau de la fantasy (et pas mal sur d'autres), avec des auteurs comme Terry Goodkind, Clive Barker, Samuel Delany, Raymond Feist, Mathieu Gaborit, David Gemmell, Robert E. Howard... Mais si tu regardes un peu en arrière, tu constateras que j'ai été enthousiasmé par ma lecture du Procès de la sorcière : http://ansible.over-blog.net/article-20965355.htmlIl y a de très bonnes choses chez Brag' !
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P
Bon, encore un livre pas fait pour moi :(Une question bête et méchante (mais sans vouloir offenser) : qu'ont-ils publié de bien les éditions Bragelonne? J'ai un peu l'impression que tu n'es pas pleinement satisfait de tes lectures provenant de cet éditeur ...
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