Hans-Ake Lilja est un fan suédois de Stephen King, au point, il y a plus de 20 ans, de créer un site -anglophone-, consacré à l'Horrorus Rex. Pour fêter ces vingt ans, Lilja a décidé de réunir une douzaine de récits de et inspirés par son idole dans un anthologie. Cela donne Shining in the Dark.
Mais qui dit "anthologie", dit -hélas- qualité diverse. En effet pour ces 12 récits (et 13 auteurs), les statuts sont différents. Certains récits sont inédits, d'autres ont déjà fait partie de recueils, certains des auteurs sont contemporains, et l'un est plutôt ancien (Edgar Allan Poe). A tout Roi tout honneur, c'est un récit de King publié en 1971 puis en 1981, Le Compresseur bleu, qui ouvre l'anthologie. Et qui est loin d'être son meilleur. Il y a d'autres grands noms du fantastique dans le recueil : Clive Barker, Ramsey Campbell. Il y a aussi des copains de King : Bev Vincent, Stewart O' Nan, Richard Chizmar et un auteur aussi rare que prodigieux, Jack Ketchum, hélas décédé depuis trois ans. Amatrices et amateurs d'histoires, je vous recommande Une fille comme les autres et Fils unique, mais aussi Comme un chien. Ici nous avons une nouvelle écrite avec P. D. Cacek, sur les pièges des réseaux sociaux, assez réussie.
Parmi les récits que j'ai beaucoup appréciés, je citerai L'Attraction des Flammes, qui raconte le calvaire de deux adolescents qui se laissent entraîner dans une sorte de maison hantée de foire. La montée de l'horreur de ce huis-clos est très efficace, et la chute, qualité essentielle dans l'écriture d'une nouvelle, vraiment réussie. Elle est l'oeuvre de Kevin Quigley, qui indique s'être inspiré de la Foire des Ténèbres, classique du genre de Ray Bradbury.
Aeliana, écrit par Bev Vincent, est aussi efficace dans le genre récit très court sur une créature capable de changer de forme et qui ne chasse que pour se nourrir. La Fin de toutes choses, de Brian Keene, est un récit intimiste extrêmement touchant sur la perte accidentelle d'un enfant. Un petit mot du Coeur révélateur, d'Edgar Poe (traduit par Baudelaire) : c'est assez léger, et un peu daté, malheureusement. L'Amour d'une mère, de Brian James Freeman, vaut surtout par sa chute, que je n'ai vue venir que juste avant. Malin.
Le plus gros morceau du recueil se trouve à la fin ; il s'agit de Le Manuel du Gardien, une novella d'une cinquantaine de pages de John Ajvide Lindqvist (qui s'est fait connaître par son roman vampirique Laisse-moi entrer, adapté deux fois au cinéma). Il nous raconte l'histoire d'Albert, lycéen féru de jeux de rôles qui invoque par erreur lors d'une partie une entité mystérieuse, qui semble surveiller l'adolescent de très près... Hommage appuyé aux récits lovecraftiens, dont un écrit par Robert Bloch, auquel Lindqvist a emprunté son monstre, un vampire stellaire.
A noter que la totalité des nouvelles, hormis celle de Poe et celle de Campbell (Jean-Daniel Brèque) a bénéficié des traductions d'Eric Holstein et Annaïg Houesnard. On en vient à ce qui constitue pour moi le point éditorial faible de cette anthologie, qui bénéficie cependant d'une très belle maquette : chaque nouvelle est complétée par deux petits bonus, une sorte de résumé et une anecdote sur l'idée ayant inspiré l'histoire. Des bonus qui sont TOUS relégués en fin de volume, ce qui oblige la lectrice ou le lecteur soit à aller en fin de volume à l'issue de la lecture de chaque nouvelle, soit, arrivé(e) au bout de la lecture des récits, à retourner se remettre en tête les différents récits en lisant ces bonus. Bref, pas très bien pensé, j'estime qu'il eût été bien plus utile de mettre les bonus à la fin de CHAQUE nouvelle. Cela coupe, à mon avis, l'expérience de lecture.
Spooky