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C'est la première fois que je lis un recueil de nouvelles ou novellas du fils, Joe Hill, juste après un recueil de même nature signé du père, Stephen King. Le hasard des achats, des choix de lecture, parfois dus aux circonstances. Et si j'apprécie l'œuvre du père depuis longtemps, comme en témoigne la longue liste de ses bouquins chroniqués ici, je dois dire que j'aime également beaucoup celle du fils. Si King a une écriture viscérale, naturaliste, qui peut vous procurer de nombreuses émotions, celle de Hill est à mon sens plus chirurgicale, plus travaillée, mais non moins prenante. Ou alors il est mieux traduit, mais je penche quand même pour la première possibilité.
Ici nous avons un gros livre de poche, contenant quatre novellas très différentes. La première, Instantané, est assez classique dans l'œuvre commune du père et du fils, avec cet homme qui a le pouvoir de voler des souvenirs grâce à un appareil photo particulier, semblable à un Polaroïd. Il s'agit, outre d'une histoire teintée de fantastique, d'une belle parabole sur le temps qui passe, l'importance des souvenirs, qui ne mégote pas sur la poésie et la tendresse envers ses personnages, notamment une vieille dame.
Chargé est un récit ambitieux d'environ deux cents pages, nous emmenant dans un centre commercial, plus précisément une bijouterie, où une employée, rejetée par son patron dont elle fut la maîtresse, décide de le tuer avant de se suicider. Mais l'affaire dérape avec l'intervention d'un vigile qui a la gâchette facile, et tue la jeune femme, mais aussi trois autres personnes, par accident ou pour masquer certaines choses. Il devient ainsi un héros national, avant qu'une journaliste tenace décide d'enquêter sur son compte, guidée par un drame familial survenu vingt ans plus tôt.
Il s'agit là d'une des meilleures histoires que j'aie jamais lues. Joe Hill y brasse beaucoup de choses essentielles, comme les violences policières aux Etats-Unis au sujet de la population noire, l'hypocrisie de cette même police américaine, le stress post-traumatique, la peur du terrorisme, le droit de porter une arme, ou encore la société de consommation. Tout cela dans une ambiance un peu apocalyptique, avec ce feu de forêt géant qui menace cette ville de Californie. Le récit est dense, implacable, et la fin est plus noire que noire. Rien que pour cette histoire, le recueil vaut l'achat.
La troisième récit, Là-haut, est assez sympa. Aubrey est un étudiant qui accompagne un groupe d'amis dans un saut en parachute pour accomplir les dernières volontés d'une amie décédée prématurément d'un cancer. Mais à peine sorti de l'avion, Aubrey se retrouve... sur un nuage. Littéralement. Sur un objet non identifié qui navigue entre les nuages, et qui semble se remodeler pour correspondre aux moindres désirs de son hôte, à part pour qu'il en descende ou qu'il meure. Le jeune homme va devoir trouver une astuce pour s'en sortir. Un récit qui recèle une grande part de mystère, mais comporte quelques longueurs.
Je suis nettement plus réservé sur le dernier récit, La Pluie. Une journée chaude à Boulder, au Colorado, est endeuillée par une pluie soudaine, non pas d'eau, mais d'aiguilles coupantes comme des rasoirs. Une jeune femme ayant assisté à la mort subite de sa compagne et de la mère de cette dernière se donne comme mission d'aller prévenir leur père et mari à Denver, à une cinquantaine de kilomètres. Commence alors une petite odyssée qui donne un aperçu de comment pourrait commencer la fin du monde, entre pillages, mesquineries et meurtres de masse. Si l'idée de base est intéressante, j'ai trouvé qu'il y avait pas mal de maladresses dans les actions des personnages, nonobstant l'intention louable de défendre la cause LGBTQIA+ et de taper sur Trump.
Au final un recueil pas inintéressant, mais des histoires allant de passable à excellente.
Spooky